06/04/2014

Adrienne




Château de Mortefontaine ( B.N.)


   Je me représentais un château du temps de Henri IV, avec ses toits pointus couverts d'ardoises, et sa face rougeâtre aux encoignures dentelées de pierre jaunies, une grande place verte encadrée d'ormes et de tilleuls, dont le soleil couchant perçait le feuillage de ses traits enflammés. Des jeunes filles dansaient en rond sur la pelouse en chantant de vieux airs transmis par leurs mères, et d'un français si naturellement pur, que l'on se sentait bien exister dans ce vieux pays du Valois, où, pendant plus de mille ans, a battu le coeur de la France.
   J'étais le seul garçon dans cette ronde où j'avais amené ma compagne toute jeune encore, Sylvie, une petite fille du hameau voisin, si vive et si fraîche, avec ses yeux noirs, son profil régulier et sa peau légèrement hâlée !... Je n'aimais qu'elle, je ne voyais qu'elle, - jusque là ! À peine avais-je remarqué, da,s la ronde où nous dansions, une blonde, grande et belle, qu'on appelait Adrienne. Tout d'un coup, suivant les règles de la danse, Adrienne se trouva placée seule avec moi au milieu du cercle. Nos tailles étaient pareilles. On nous dit de nous embrasser, et la danse et le choeur tournaient plus vivement que jamais.
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Henri Le Sidaner - Ronde de jeunes filles


Gérard de Nerval - Sylvie



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